PORTRAIT D’UNE COMMUNIANTE 

Paul Cuvelier a réalisé en 1953 le portrait d’une jeune fille de Mons alors âgée de 13 ans. Il s’agit d’une œuvre au pastel sec d’une assez grande dimension (89 X 65).

Sur la base du témoignage de cet enfant d’alors, témoignage recueilli en mars 2018, voici ce que l’on peut dire du contexte et de la réalisation de ce tableau.

Le chanoine Maurice Orban, oncle et aussi parrain de cette jeune fille, était un homme passionné d’art. Il avait enseigné au Collège Saint Augustin d’Enghien, où Paul avait été élève. Par l’intermédiaire d’un ami commun, le sculpteur René Harvent, il entra en contact avec l’artiste et devint le commanditaire de cette œuvre.

Ce tableau a été réalisé dans l’atelier que Paul occupait à Mons rue Notre-Dame. Ce local, une sorte de véranda, était situé au fond d’une cour et était équipé d’un vieux poêle rond, d’un paravent et d’un matelas posé sur le sol, supposé être le lit de Paul. 

Les séances de pose avaient lieu le mercredi après-midi, de 14 à 16h environ, et parfois le samedi. Après avoir réalisé quelques dessins préparatoires, Paul avait débuté le portrait par une esquisse au crayon déjà assez détaillée pour ne continuer ensuite qu’avec ses pastels de couleur. 

Le choix de la robe, que portait l’enfant, ne s’est pas fait facilement. Dès les premières séances, elle devait venir avec un vêtement différent, car Paul n’en était jamais satisfait. Il demanda si elle possédait encore sa robe de communiante. Ce fut cette tenue portée la fois suivante qui alors plut à Paul.

Au cours des séances, Paul ne parlait pas ; il travaillait de manière concentrée. Parfois, il interrompait son travail pour fumer. Il arrivait aussi qu’après une pose, Paul quitta son atelier à la hâte pour se rendre à la poste. Il partait expédier des planches de bandes dessinées en disant : « C’est ce qui me fait vivre la semaine… ».

D’après les dire des parents entendus par l’enfant, une cinquantaine d’heures de travail furent nécessaires à la réalisation du portrait. Il leur a semblé qu’à l’issue de l’avant-dernière pose la ressemblance était la plus frappante. Mais toujours soucieux d’améliorer son travail, l’artiste voulut retravailler son œuvre une ultime fois. Ce fut au détriment non pas de la perfection mais de l’expression, plus académique, donnée au visage.

Ce portrait a orné, pendant de nombreuses années, le salon de la maison familiale de la jeune fille et, à présent, a trouvé une place d’honneur dans son appartement. 

La jeune fille d’alors se rappelle avoir vu dans l’atelier de Paul un autre tableau en chantier devant représenter une mère de famille et ses deux jeunes enfants. Quelques années plus tard, cette œuvre fut exposée au Musée des Beaux-arts de Mons lors d’un salon d’ensemble. Par contre, le portrait dont il est ici question, ne fut jamais exposé.

Grégoire CUVELIER

Cet article est la propriété de la Fondation Paul Cuvelier.